La guerre de la conquête
Le sort des officiers canadiens
Le phénomène à la fois le plus surprenant et le plus révélateur de cette période touche les officiers des Compagnies franches de la Marine et des compagnies de canonniers-bombardiers. Parmi les 63 présents à Montréal lors de la reddition, 44 choisissent de rentrer en France. D'autres partiront l'année suivante - et un certain nombre d'entre eux périront d'ailleurs dans le naufrage de l'Auguste.
La différence fondamentale entre ces officiers et les autres militaires des régiments français est que les Canadiens ne « retournaient » pas en France, puisqu'ils n'y étaient tout bonnement jamais allés. Issus de familles de gentilshommes établies en Nouvelle-France depuis le XVIIe siècle, la plupart étaient nés au Canada. Au sein de la société canadienne, ces officiers jouaient non seulement le rôle de défenseurs, mais encore celui de dirigeants ; grâce à leurs alliances familiales, ils exerçaient une influence notable sur la vie économique de la colonie.
Dans ces conditions, on peut se demander pour quelle raison ils abandonnaient leur terre natale. En réalité, certains étaient tout simplement incapables de subsister au Canada dans un autre contexte que celui du service militaire. D'autres ne pouvaient concevoir de se retirer sur la seigneurie familiale pour être gouvernés par les Britanniques en attendant que soit scellée la paix entre la France et l'Angleterre. Enfin, ces hommes étaient avant tout des militaires au service de leur roi, désireux de poursuivre leur carrière dans les forces armées et de se battre pour la France, et il se trouve que la guerre se poursuivait ailleurs.
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